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Rendre la culture plus inclusive
A Great transition Project
A Great transition Project
En 1979, Pierre Bourdieu publie La distinction. Il entend démontrer que nos activités culturelles, bien plus qu’une question de goût personnel, relèvent de notre statut social. A la classe dominante les samedis à l’opéra, les dimanches au théâtre et les visites de musée. Aux classes populaires la télévision de masse. Même dans le sport, on retrouve cette distinction, le tennis pour les bourgeois et le football pour les prolétaires. De l’habillement à l’alimentation, rien n’échappe à la discrimination du style de vie par des déterminismes sociaux. Dès 1966, Pierre Bourdieu et Alain Darbel écrivaient dans L’amour de l’art que “l’accès aux oeuvres culturelles est le privilège des classes cultivées”.Ainsi le terme même de “démocratisation de la culture” semblait problématique aux yeux de Bourdieu car cette démocratisation restait dans le cadre de la culture légitime décidée par la classe dominante, à des années lumières de la culture populaire, ou des banlieues.
Dans les années 50 se développent les banlieues rouges et le socialisme municipal. Puis, à partir des années 70, c’est le début de la construction de grands ensembles et l’entrée en crise du modèle. La politique de gestion de la ville vient concentrer les population d’origine étrangère dans les logements sociaux, conduisant à des logiques territoriales de regroupement communautaires, impensées par les gouvernements successifs. Aujourd’hui, la banlieue cristallise les problèmes sociaux et culturels. En 2001, Richard Descoings, président de Sciences Po Paris, commençait une petite révolution en adoptant des conventions avec plusieurs lycées classés en Zone d’Education Prioritaire. Cela exemptait une vingtaine de bacheliers des concours d’accès à la prestigieuse école. La démocratisation de l’accès à Sciences Po n’a cessé de s’amplifier depuis, mais le chemin est encore long.
Étudiants de Sciences Po, il nous semble regrettable que l’accès aux grandes écoles dépende de notre lieu de naissance. Pour autant, nous souhaitons nous extraire un instant de la lecture bourdieusienne de la culture de deux manières.
D’une part, il faut bien concéder par pragmatisme qu’on ne révolutionnera pas la hiérarchisation de la culture de si tôt. C’est un fait incontestable que l’accès aux grandes écoles repose encore sur cette culture dite légitime. Ou bien on l’accepte, ou bien on s’expose à une indignation stérile. D’autre part, nous croyons qu’au-delà de la distinction sociale qu’elle permet, la culture est d’abord la voie vers la liberté. La culture classique, avant d’être le privilège d’une classe, est une réponse intemporelle aux questionnements de la nature humaine. Plus que de briller en société ou de multiplier les diplômes, la culture a la vertu de l’édification intérieure. Nul ne mérite d’en être privée. Si La France périphérique décrite par Christophe Guilly souffre d’une barrière géographique due à la forte concentration des activités culturelles dans les métropoles, principalement à Paris, la banlieue, proche des centres urbains souffre avant tout d’une barrière symbolique. C’est sur cette dernière que nous souhaitons porter notre attention.
Comment augmenter la fréquence de visite des musées par les jeunes de banlieues ?
Tel est le problème auquel souhaite répondre notre projet. André Malraux écrivait que le plus grand problème de notre temps serait la diffusion de la culture au plus grand nombre. Il en va de la survie même de la communauté nationale, et de l’éducation à la liberté de chacun.