Lettre d’intention

Le problème

L’industrie est aujourd’hui reconnue comme la 2ème industrie la plus polluante au monde. De ce fait, 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre sont émis chaque année par les usines textile et 25 % de tous les pesticides et 10 % des engrais utilisés dans le monde sont destinés à la culture du coton. La globalisation de l’industrie a facilité la création de chaînes de production à rallonge, difficiles à superviser. La transmission des informations entre les maillons de la chaîne se fait en silos de par le manque d’interopérabilité entre les multiples outils de communications à différents niveaux de la chaîne. En effet, un travailleur en Inde ne communiquera pas sur Slack et ne transmettra pas les informations par le même biais que ses supérieurs à d’autres maillons de la chaîne. Selon Rebecca Migirov, directrice communication chez Chronicled, une entreprise de conseils développant des applications décentralisées grâce à la blockchain, notre modèle de production est devenu « une structure obsolète (…) une collection de liens rouillés, avec des producteurs et des consommateurs bloqués dans d’obscurs relations commerciales qui les empêchent de réellement se comprendre, de comprendre l’environnement qui les entoure, et la nécessité d’établir des règles de travail justes et éthiques. » (Migirov, 2016) Les chaînes de productions textiles sont devenues de plus en plus complexes à superviser dans un environnement mondialisé. Le manque de transparence et l’asymétrie d’information entre les différents acteurs de la chaîne empêchent les entreprises de contrôler les conditions de travail de leurs employés aux quatre coins du monde. Ainsi, peu de marques se donnent réellement les moyens de divulguer le détail de leurs chaînes de production. Cela peut allers des noms de leurs fournisseurs en matières premières, à leur véritable Made In ou simplement les conditions de productions de leurs travailleurs, etc.

Cependant, avec le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC) permettant aux consommateurs d’accéder à tout type d’information, ceux-ci s’intéressent de plus en plus à la provenance des produits qu’ils achètent. Les marques deviennent aujourd’hui les seules responsables et se doivent d’établir de nouveaux standards de production, plus respectueux de l’environnement et des hommes. Selon Karen Harvey, CEO de sa propre agence de conseils, « les consommateurs attendent des marques qu’elles soient transparentes envers eux sur toutes les facettes de leur organisation, depuis les processus de production jusqu’aux valeurs de chaque personne au sein de leurs équipes. Ils veulent comprendre comment la marque interagit avec le monde et si cela va de pair avec leurs valeurs » (2017). Cependant, si l’intérêt des consommateurs pour découvrir qui se cache derrière leur t-shirt monte en puissance, les institutions publiques ne considèrent pas encore comme nécessaire d’établir des lois obligeant les entreprises à révéler plus d’informations sur leurs moyens de production, le textile n’étant pas considéré comme un problème de santé publique, à l’inverse de l’alimentaire par exemple. Ainsi, une seule et unique loi existe en Angleterre contraignant les entreprises à dévoiler publiquement les mesures prises au cours de l’année afin d’éviter l’esclavage et le trafic d’humain dans leur chaîne de production. Cette loi se nomme The Modern Slavery Act, et est appliquée depuis 2015 aux entreprises de biens et de services dont le chiffre d’affaire est supérieur à 36 Milliards d’euros, en Angleterre.

D’autres initiatives se déploient et prennent de l’ampleur. Ainsi le mouvement “Who Made My Clothes” lancé par l’organisation de consommateurs The Fashion Transparency est devenu un rituel pour les marques qui se voient obligées de révéler leurs informations sous la pression des consommateurs, regorgeant de questions posées publiquement sur les réseaux sociaux. Fort de son succès, le mouvement a lancé un Index, The Fashion Transparency Index, classifie les marques de mode de la plus transparente a la plus opaque. Chaque année l’index s’agrandit avec de + en + de marques volontaires à l’analyse.

Ainsi, comment augmenter le nombre de marques référencées dans le fashion transparency index afin d’améliorer la transparence dans les chaînes de production et réduire l’esclavage humain ?

Concept proposé et persona

Afin de répondre à ces enjeux majeurs qui menacent gravement l’environnement, notre équipe a décidé de créer une application, basée sur les index de The Fashion Revolution, attribuant des notes aux entreprises du secteur de la mode. Cette application c’est ORIJEAN. Ce sera la première application qui permettra aux consommateurs de jauger du degré de responsabilité de n’importe quelle marque de vêtements. Impact social, impact écologique, l’ensemble des critères du Fashion Transparency Index seront compilés dans notre application afin d’établir un système de notation des différents acteurs du marché, et surtout d’éclairer le consommateur qui souhaite acheter de manière plus responsable. Cette application sera déclinée en une version gratuite mais soumise à la publicité, et une version payante sans contenu publicitaire, deux versions qui permettront d’assurer à notre projet sa stabilité financière. La cible de cette application, environ 900 000 français que l’on désigne comme des « nomades connectés », jeunes, de la vingtaine à la trentaine, ouverts sur le monde. Ceux sont la cible idéale car ils consomment utile et responsable et se servent d’outils technologiques pour les guider dans leur consommation.

Notre collectif porte aussi un deuxième projet en support de notre application. Ce second volet de notre action sera lui à destination des industriels de la mode. En effet nous souhaitons réaliser un booklet destiné aux marques de mode désireuses d’avoir accès aux chiffres précis et détaillés de leur industrie. Nous souhaitons devenir la référence dans la collecte et la compilation de données détaillées du secteur de la mode. Cette activité, qui au premier abord semble éloignée de l’idée de responsabiliser le secteur de la mode, est bien liée à notre volonté de réduire son impact sur nos sociétés. L’idée est de proposer des informations détaillées, tout en incluant l’impact que coûte une gestion aveugle des moyens de production à la fois à notre planète, les travailleurs, et de mettre en avant les chiffres de sociétés plus responsables qui, par l’adhésion du public, développent des rentabilités équivalentes aux acteurs irresponsables.

Impacts positifs attendus

Notre projet se dévoilant en deux volets, les impacts positifs attendus se ramifient en fonction. D’abord, nous espérons que l’application ORIJEAN incite une part de la population à consommer de façon plus responsable grâce aux clés et aux connaissances proposées par l’application. L’objectif est de valoriser les marques éthiques et de privilégier les vêtements de meilleur qualité, produits dans le respect de l’environnement et des travailleurs. Cette voie pour le futur sera encouragé par les utilisateurs de l’application, motivés par le sentiment de participer à une bonne cause.

Deuxièmement, les booklets à destination des professionnels, fournis de données quantitatives et qualitatives sur l’état de l’industrie, offriraient une compréhension plus fine du marché, de ses évolutions. Cela permettrait d’instaurer des rapports de conseil plus performants, dans l’idée, toujours, de mieux référencer les marques au Fashion Transparency Index. À terme, le mélange des impacts positifs attendus des deux volets permettent non seulement que plus de marques soient référencées, mais également qu’elles se tournent vers des moyens de production et de distribution plus transparents et in fine éthiques.

Risques majeurs et actions pour les réduire

La mise en en place de notre projet (application+booklet) peut évidemment rencontrer des inconvénients majeurs. En premier lieu, l’aversion de certains acteurs à notre projet est un inconvénient. En effet, l’industrie textile elle-même, avec toutes ces marques privilégiant le coût de fabrication et le profit à la qualité , le mode de fabrication et le respect environnemental. On peut donc se retrouver face à une industrie réfractaire à notre projet qui vient les obliger à changer leurs habitudes de production. Également, la mise en place du projet rencontre un second opposant potentiel, tous les décisionnaires ayant des intérêts économiques ou politiques dans ces grandes entreprises et qui dès lors ne souhaitent pas bousculer le business plan de ces entreprises. Nous devons donc faire face au lobbying de l’industrie qui pourrait réduire notre champ d’action. En deuxième lieu, d’autres inconvénients forment un risque pour le projet. Par rapport à l’industrie textile, celle-ci pourrait accentuer le greenwashing déjà existant. C’est à dire que les entreprises pourraient orienter de plus en plus leurs actions de communication vers une image verte, écologique malgré la pollution excessive qu’elles génèrent. Et face à cela, le problème serait l’asymétrie d’information et la difficulté à déchiffrer parfois la vérité. En effet, une certaine opacité et difficulté de communication entre les différents sous traitants sur une chaîne de production peut être un problème. Par ailleurs, les moyens financiers peuvent aussi être une source de problème, puisque si nous allons gagner de l’argent par la vente du booklet et l’application, il faut dans un premier temps les développer et les produire, ce qui est coûteux. Il faut donc pour cela avoir un « cash burn-rate » suffisant pour que le projet soit pérenne. Et si nous avons des partenariats à gagner ou des influenceurs potentiels qui pourront peut être nous aider gratuitement dans la communication du projet, les moyens financiers peuvent être un problème au départ.

Mais ces risques peuvent être réduits à travers quelques moyens d’actions. En effet, face aux entreprises réfractaires au projet, il faut tout simplement trouver une motivation à la transition pour ces entreprises, en donnant notamment des bonus via l’application aux entreprises leaders sur le dialogue consommateur et la transparence de production. Ainsi, les entreprises vont (pour préserver leur image de marque et continuer à vendre) s’efforcer à se plier à ces critères. Cela peut se renforcer par une action de notre part consistant à continuer à sensibiliser toujours plus les consommateurs sur les impacts de leur consommation de vêtements, les informer pour qu’ils décident en connaissance de cause, pour ainsi modifier en profondeur les habitudes de consommation et pour avoir un impact toujours plus fort sur les entreprises. Cela passe par une mobilisation, une communication à 360 degrès, avec par exemple faire de la communication sur les réseaux sociaux ( brut, konbini..) pour lancer une alerte, témoigner etc.. ou encore trouver des égéries qui pourraient soutenir et représenter la cause. Cela pourrait réellement sensibiliser le public. Mais pour être vraiment efficace, il faut également aller un peu plus loin. On peut faire intervenir des associations de consommateurs, toucher des personnes liés à la politique (notamment les écologistes ou partis étudiants) pour rendre toujours plus visible nos idées, tout restant dans la ludification : par exemple, des événements avec concerts etc. Enfin, pour inciter tout le monde à changer ses habitudes de production ou de consommation, il faut réussir à créer un meilleur dialogue entre les marques et leurs consommateurs avec en guise d’exemple 1 jour par an où les marques répondent à toutes les questions de leur clientèle : « Who made my clothes ? ». Enfin, concernant les éventuelles difficultés financières pour lancer le projet, lancer une campagne de financement auprès des volontaires prêts à soutenir l’initiative à travers une levée des fonds sur les plateformes de crowdfunding semble être une bonne alternative. Par ailleurs, faire appel à des étudiants engagés pour réaliser gratuitement les études quantitatives et qualitatives est aussi une solution.

Stratégie de déploiement et jalons majeurs

Pour atteindre nos objectifs, il faut alors prendre en compte dans notre stratégie deux cibles essentielles de notre projet : les consommateurs et les professionnels de la mode et du textile. Pour ce faire notre projet sera organisé et regroupé en trois grandes étapes.

Tout d’abord, nous créerons une base de données en collaboration avec le mouvement Fashion Revolution afin de récupérer les informations, les analyses.. recueillies par la Fashion Transparency Index. Suite à cela, cette base de données prendra la forme d’une application nommée Orijean. Elle recensera de manière plus synthétique et esthétique les donnés recueillies et permettra aux utilisateurs de s’informer rapidement et efficacement sur la provenance des produits désirés. Une fois notre outil prêt, une communication auprès des consommateurs sera dévoilée et déclinée sur différents médias et supports. En parallèle, pour sensibiliser davantage les marques, une communication en be to be sous la forme d’un booklet sera envoyée. Enfin, des évènements seront organisés durant l’année pour faire vivre l’application, sensibiliser plus largement la population et les marques afin de créer une véritable communauté engagée auprès de cette cause. Les avis des utilisateurs seront collectés pour améliorer l’applications, des sondages seront commandés pour s’assurer de la durabilité du projet auprès des marques concernés, et des évènements tels que des vides dressing seront proposés par la marque Orijean afin de présenter des alternatives correspondant aux valeurs et aux fondements de notre marque.

Pour plus de détails…

Le lancement de l’application Orijean se déroulera lors de la soirée d’ouverture de la la Fashion Revolution Week organisée chaque année le 24 avril. Nous désirons une communication forte qui marquera les esprits afin de mettre en lumière rapidement notre produit. Pour ce faire, nous avons décidé de ne pas révéler directement l’existence de notre application. La communication créer autour de la Fashion Revolution Week annoncera qu’une surprise sera dévoilé lors de cet évènement. Un storytelling est alors créé et diffusé sur le site Fashion Revolution, sur les réseaux sociaux, dans les écoles de modes de la capitales ainsi que par les plus grands noms de la mode présent lors de cette cérémonie. Cet évènement sera retranscrit sur le site Fashion Revolution ainsi que sur les réseaux sociaux. Notre application sera alors dévoilé en direct et téléchargeable sur smartphone à compter de ce moment. Dans la semaine qui suit l’ouverture de cette événement, une communication sur mesure sera alimentée sur les réseaux sociaux afin de présenter notre marque, notre application.. auprès de la fashion sphère. Suite à cet évènement, les booklets seront envoyés aux marques choisies et une communication touchant une plus large population ponctuera l’année afin de sensibiliser et de changer les modes de consommations des utilisateurs et les modes de productions des industriels de la mode.

Analyse du retour sur investissement

Notre projet nécessitera un investissement initial de 27000 euros, dont 15000 euros pour la conception, promotion et déploiement de l’application mobile et 12000 euros pour la réalisation des booklets. D’après nos estimations, ces produits devront nous générer un chiffre d’affaire croissant (cf tableau 1), grâce à l’application mobile qui touchera de plus en plus de personnes (frais de téléchargement et aux commission de publicité), le chiffre d’affaire concernant la vente de booklet devrait être stable au fil des années.

Concernant les dépenses d’exploitation, nous avons établi différents postes de coût : personnel, marketing, maintenance… (cf tableau 2)

Ainsi, ces estimations nous permettent d’estimer notre résultat d’exploitation au cours des 5 premières années (cf tableau 3). Il est possible que le résultat d’exploitation de la première année soit négative, mais cela n’a rien d’alarmant : nous comptons sur cette première année pour développer notre image de marque, se faire connaître et ainsi, atteindre plus de personne à travers notre application mobile les années suivantes.

Grâce à ces différentes estimations, nous pouvons analyser le retour sur investissement avec l’estimation des cashflows futurs (cf tableau 4). Avec un taux d’actualisation à 10%, notre projet est rentable (plus précisément, on a une valeur actuelle nette à 2711,76 euros et un taux de rentabilité interne de 12,64% ) et le délai de récupération est de l’ordre de 4 ans et 9 mois.

Organisation

Pour mener à bien ce projet, nous allons nous servir de nos compétences respectives afin de développer au mieux Orijean. Pour ce qui est de l’équipe managériale et opérationnelle: Laure s’occupera de développer l’application puisqu’elle a une formation dédiée, Philibert et Lucas s’occuperont des ressources et du suivi financier, Faustine s’occupera de la partie design et image de marque puisque son ancienne formation l’y a formée et Alice se chargera du marketing et de la communication liée à l’entreprise et à ses activités, avec l’aide de Clara. Camille fera de la sensibilisation pour l’utilisation de l’application grâce à son entreprise CrushOn, et notamment lors des Vintage Markets. Par ailleurs, nous allons tenir compte des ressources disponibles à SciencesPo comme la Junior Entreprise, ou l’accès aux bases de données et aux études menées sur notre sujet. Nous aimerions avoir comme partenaire des ONG et groupements liés à la cause que l’on défend afin de nous apporter visibilité et couverture.